UN
AZÉROLIER (CRATAEGUS AZAROLUS, ROSACÉES),
«ABREUVOIR» INSOLITE POUR LES INSECTES DE
LA GARRIGUE
À CÉBAZAN (BITERROIS)
(version 2024)
par André Lopez *, auteur, & Francis Marcou
|
Article figurant dans le Bulletin 2021
de la
Société archéologique, scientifique et
littéraire de Béziers (p.49 à 61), l'auteur
en
étant alors membre (*). Avec les textes, figures, notes terminales et
leurs liens.
Les photos présentent ici une meilleure finition, notamment dans
les planches "télescopées" par l'imprimeur
dans l'article original.
Couleurs
conventionnelles :
En noir et italiques, termes anatomiques ; en violet,,
noms
génériquess et spécifiques ; en kaki,
noms vernaculaires et non linnéens ; en marron, termes biologiques et
chimiques
-en vert, noms de
familles et
sous-familles ; en bleu clair, noms de
groupements plus élevés ; en bleu foncé, liens ;
en orange,, parties
les plus importantes
et résumés.
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I- Introduction
II - L'Azérolier
III- L'écoulement anormal de sève
IV -Liste des Insectes
consommateurs
1-Coléoptères
2-Hyménoptères
3-Lépidoptères
4-Diptères
5-Hémiptères
V-Considérations entomologiques
1-Anatomie des
pièces buccales
2-Comportements
particuliers de certains Insectes
VI-Commentaires
1 -Données
comparatives
2 - Données
écologiques
3 - Nature présumée de l'attraction
VII -Conclusion
I –Introduction
Cette
nouvelle nôte
d’intérêt naturaliste concerne
un Azérolier,
petit arbre pourtant banal dans le Biterrois mais
qui a présenté l’étrange particularité,
jusqu’ici non observée, semble-t-il, chez cette espèce,
d’attirer
par l’écoulement diffus de sa sève
sur les branches, une
foule d’ Insectes,
ailleurs de rencontre fortuite ou malaisée,
et qu’il a été possible d’observer tout près et de
photographier sans effarouchement (Planches I et II : © F.Marcou).
Associant la Botanique et l’
Entomologie, elle met en exergue un
cas
étrange du rôle des sémiochimiques
végétaux par leur extraordinaire pouvoir attractif et la
sensibilité,
non moins remarquable, des récepteurs
nerveux des antennes
d’
Insectes1.
La cause de l’écoulement, sans aucun doute pathologique, ne peut
être encore précisée.
II –L’Azérolier
L’Azérolier
(Crataegus
azarolus), Azarolier
ou Epine
d’Espagne est un petit arbre originaire du bassin
méditerranéen, du même genre que les
Aubépines (Crataegus
monogyna
et laevigata),
de croissance
lente, atteignant de 6 à 10m de hauteur, épineux,
à port dressé et houppier
arrondi.
D’abord lisse et gris clair,
l’écorce devient
brunâtre avec des écailles et des gerçures.
L’exemplaire objet de cette note est
haut d’environ 4 m (Fig. 1, hiver
2021) et agé de 20 à 25 ans.
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Fig.1
- Azérolier de
Cébazan, sans feuilles, en Hiver 2021
|
Du
printemps à l’automne, les
feuilles, fleurs et fruits ont
l’aspect habituellement rencontré chez son espèce.
Malgré une floraison et une fructification apparemment normales,
comme décrites ci-dessous, il présente un aspect
souffreteux et une écorce largement
desquamée (Fig.2,A).
Les jeunes pousses sont
blanchâtres, légèrement
duveteuses avec des bourgeons
globuleux. Les rameaux sont
pourpre
foncé, avec des épines
disséminées.
Les feuilles (Fig.2,B), caduques,
alternes, sont vert
foncé
et brillantes dessus, de couleur vert-blanchâtre en dessous.
Mesurant entre 5 et 7 cm de long, elles présentent une forme
d’éventail profondément divisé en 3-5 lobes
entiers ou un peu dentés au sommet et un pétiole
velu-cotonneux, du moins à sa base.
Les fleurs (Avril-Mai)
(Fig.F,B) sur
pédoncules
également
tomenteux, sont petites ( 1cm de diamètre),
à 5 pétales
arrondis. blancs ou rosés, à
sépales à-peu-près aussi larges que longs et
à deux styles (parfois
un seul).Groupées par 10
à 20 en bouquets terminaux ou corymbes, elles
dégagent une odeur peu agréable comparée parfois
au poisson décomposé, en fait évoquant
plutôt celle du salicylate
de méthyle2
et attirent peu d’
Insectes (Abeilles,
Bourdons).
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Fig.2
– Azérolier. A : branches et
écorce, détails (hiver) – B : feuilles, fleurs -
C : fruits (azéroles).
|
Elles
sont suivies de fruits
appelés azéroles
(fig.2,C),
«pommettes» en Occitanie car évoquant des pommes
miniatures ou, plus spécialement dans le Biterrois,
«bouteillous», mûrissant en Septembre-Octobre. De 2
à 4cm de diamètre, donc plus gros que les
«cénelles» des Aubépines, ils sont
globuleux-ovoïdes, jaunâtres à rouge vermillon,
contiennent 2 à 3 noyaux,
avec une pulpe juteuse,
sucrée,
à saveur acidulée, évoquant un peu la pomme.
Rappelons en passant que ces azéroles sont très bons crus
ou cuits
en compote, confitures et gelées, très nutritives
(100kcal/100g) ; elles contiennent des sucres, de la pectine, des
vitamines A et C ainsi que des flavonoïdes antioxydants
3 ce qui
explique qu’elles soient
récoltées activement dans le Sud de la France où
l’ Azérolier fut
même cultivé. Le genre Crataegus,
Aubépines
comprises, a d’ailleurs des vertus
pharmacologiques
médicinales d’une extrême diversité mais elles
sortent
du cadre du sujet.
III - L’écoulement anormal
de sève
L’écorce
de l’Arbousier
cébazanais se détache
largement et indique déjà un certain degré de
souffrance,
d’autant plus que cet arbre présente l’anomalie majeure d’
un écoulement de sève assez
diffus jamais encore
constaté
sur tous les autres exemplaires de même espèce qui ont pu
être examinés, à titre comparatif , en divers
points
du Biterrois où ils prospèrent, parfois en grand nombre,
formant alors des bosquets comme à la Barre du Puech
blanc,
entre Vendres et Lespignan.
Il y a environ deux décennies,
l’un de nous (F.M.) en planta un
jeune pied dans son jardin de Cébazan (Biterrois, St
Chinianais), sis au hameau de la Gache, complétant ainsi
sa collection
d’ espèces arbustives et arborées issues de la garrigue.
Du Printemps 2018 au Printemps 2020, il eut la surprise de constater
que
cet Azérolier
était fréquenté assidument et
avec opiniâtreté par une foule d’ Insectes adultes
(imagos)
appartenant aux ordres les plus divers.
Ils
y étaient attirés,
non sur le tronc ou les rameaux
mais plutôt les branches
primaires, par une exsudation de
sève en écoulements continus provenant non
de
plaies circonscrites mais du dessous de l’écorce externe ou
liège, soulevée
en plaques et de diverses zones
dénudées, variant d’une
année à l’autre, d’origine imprécise
(gel,sècheresse,traumatismes,infection)(Fig.2,A), suintant sur
le cambium 4
rougeoyant dénudé
(Fig.40,42,43) ; il
n’y avait point les orifices de galeries qu’auraient pu y creuser
des Insectes (sapro)xylophages
5,tels
que les Scolytes
6, ni
de sciure extraite. Ce liquide fluide, non visqueux, d'une
légère odeur
acidulée de fruit gâté,
translucide et, par places, d’aspect écumeux (Fig.6,24,37,41,42)
se coagulait en plaques ou trainées noir-rougeâtre ;
les zones spumeuses blanchissaient en séchant et formaient
des
sortes de «concrétions» d’un blanc pur, laiteux,
complètement
opaques. Selon toute évidence, il s’agissait de la
sève
dite «élaborée», celle qui circule
normalement
dans le phloème 4, tissu
conducteur du liber
(écorce
interne)4
situé juste sous l'écorce
externe (liège)4,
contenant
des substances organiques solubles, surtout des glucides
(saccharose,
sorbitol, mannitol) et acides aminés provenant des feuilles et
racines,
appareil végétatif.
Il est bien connu que l’
écoulement de sève s’accompagne
d’une prolifération de virus, bactéries et champignons
entrés à la faveur de brèches ( blessure ou
autres). Les bactéries surtout font fermenter la sève en
anaéorobiose (absence
d’oxygène), avec libération de gaz (méthane,
dioxyde
de carbone) dont la pression pousse à l’extérieur
l’écoulement
qui devient auto-entretenu, passant ainsi à la
chronicité,
colonisé par des bactéries spécifiques que l’on ne
connaît pas ailleurs. L’émission
gazeuse explique
l’aspect
spumeux localisé et d’un blanc éclatant que prennent les
trainées de suintement.
La
couleur et la consistance prouvent
qu’il s’agit bien de sève
et non d’une gomme naturelle. Exsudat épais, de couleur
ambrée, de contact visqueux et se durcissant peu à peu
à l'air,
cette dernière est un mucus
polysaccharidique normal
sécrété par des cellules
spécialisées, issu de la dégradation des
réserves amylacées de la plante et non exploité
par les Insectes qui s’y
englueraient. Sa production ou
«gommose» est un moyen de défense de l'arbre contre
une agression extérieure, physique (blessures, branche
cassée par le vent, gel) ou biotique (Insectes xylophages
5,
microorganismes).
Elle concerne, surtout
chez nous, des Rosacées
(Rosaceae) autres que
l’Azérolier : les
fruitiers arborescents
du genre Prunus
(Cerisier, Pêcher, Abricotier, Amandier, Prunier).
L’écoulement de sève
décrit ici, observé
depuis 2018, se tarissait lors de la sécheresse, notamment en
période caniculaire, et ne laissait plus en hiver que de vagues
trainées noirâtres. De même, ses structures en
«concrétions» auraient pu persister si les pluies ne
les avaient dissoutes jusqu'à les faire disparaître
complètement.
Avec l'agravation de
l'aridité liée au réchauffement climatique
le phénomène ne s'est plus manifesté à
partir de Juin 2022 et
en 2023.
IV
– Liste des
Insectes
consommateurs
A
priori, tous
étaient issus de jardins environnants,
peut être de la ripisylve du Lirou et surtout, de la
garrigue
à Chênes verts
et Pins d’ Alep
établie sur les
basses
collines toutes proches dominant la cuvette de Cébazan et
malheureusement incendiée en partie depuis peu. Certains jours,
il a pu être observé une véritable foule
grouillante, avec accouplements, soit réunissant plusieurs
espèces d’une même sous-famille (Fig.3), soit un afflux de
taxons disparates, très serrés, côte à
côte, parfois même superposés (Fig.3,4,photo terminale), et que l’on
conçoit mal dans un
rapport aussi intime en milieu naturel, notamment les deux Frelons 7
sensés « rivaux », européen et asiatique.
Dans tous les cas, ces Insectes
étaient si absorbés par
leur prise de nourriture qu’ils n’avaient aucune réaction de
fuite, nous permettant ainsi d’observer une absorption effective
du liquide avec les pièces
buccales, ingestion
confirmée par l’examen à fort grossissement des
macro-photos numériques.

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Fig.3
- Foule de Cétoines, Frelons et Diptères (flèches)
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Fig.4
- Cétoines, Capricorne et Papillons.
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En voici la liste, établie
par
ordres et familles suivant la
nomenclature taxinomique en vigueur, avec leurs noms
vernaculaires,lorsqu’il existent,et linnéens, suivis du nom
d’auteur abrégé et de la
taille maximum (longueur, envergure pour les Papillons). La
plupart
figurent dans les planches.
1
– Coléoptères
Scarabaeidae : Cetoniinae
(Cétoines)
: Cétoine
dorée, Cetonia aurata
L., 20 mm.(fig.6) - Cétoine
cuivrée, Protaecia
(Netocia) cuprea (F.),23 mm.(fig.7)
- Cétoine mate,
Protaecia
(Potosia) opaca
(F.),18
mm.(fig.8) – Cétoine
noire, Protaecia
(Netocia, Potosia) morio
(F.),20 mm.(fig.9) –
Cétoine oblongue,
Protaetia (Netocia) oblonga (Gory.
& Perch.),16 mm.(fig.9).
Cerambycidae
(Longicornes) : Grand
Capricorne, Cerambyx
cerdo
L., 60
mm. hors antennes (fig.11,12) - Petit
Capricorne, Cerambyx scopolii
Fuessl., 28 mm. hors antennes (fig.10) - Clyte des champs,
Xylotrechus
arvicola Ol., 10
mm.(fig. 12,13).
Lucanidae
: Dorcus
parallélépipédique, Petite
Biche, Dorcus
parallelipipedus
Mac Leay, 30 mm.(fig.14).
Staphylinidae
: Oligota
sp.Mann.,1mm.(fig.15).
Buprestidae
: Anthaxia
funerula Ill.,
4 mm.(fig.16).
2
-
Hyménoptères
Formicidae : Plagiolepis
pygmaea (L.),
2 mm.(fig.23) - Cataglyphis
cursor (Fons.),7 mm(fig.24) - Camponotus
vagus Scop.,10 mm.(fig.25).
Vespidae
: Guêpe germanique
ou
européenne, Vespula
germanica (F.),
13 mm. - Frelon européen,
Vespa crabro
L.,35
mm.(fig.19,20) – Frelon
asiatique, Vespa
velutina Lepel.,20-30
mm.(fig.21)– Poliste gaulois,Polistes
gallicus (L.),15
mm.(fig.18).
Apidae
: Bourdon des jardins,
Megabombus
hortorum (L.),16
mm.(fig.17,37).
3 –
Lépidoptères
Nymphalidae : Vulcain,Vanessa atalanta
L.,60 mm.(fig.28,29) – Jason,
Charaxes
jasius L.,90
mm.(fig.26,27,45) - Silène,
Brintesia
circe
(F.), 65 mm.(fig. 27,31,32) - Tircis, Pararge
aegeria L.,42
mm.(fig.30). Les deux premiers font partie de la sous-famille des
Nymphalinae, le Silène et le Tircis de celle des Satyrinae
à ocelles caractéristiques.
Noctuidae
: Noctuelle
cuivrée, Amphipyra
pyramidea
L.,50
mm.(fig.33).
4 -
Diptères
Syrphidae : Ferdinande
dorée,
Fernandinea
cuprea
Scp.,15mm.(fig.34).
Muscidae
: Aricie du lard, Polietes
lardaría F.,12mm.
Calliphoridae
: Mouche bleue ou
à viande, Calliphora
vomitoria L.,14 mm. (fig.35) - Calliphora
vicina Rob.Desv.,12 mm –
Mouche verte,
Lucilia
caesar L., 10
mm.(fig.36,37).
Platystomatidae
: Grande bouche ("kiss
fly"), Platystoma
seminationis,10 mm. (fig.38,39).
Drosophilidae
: Mouche des fruits
panachée, Phortica
variegata
(Fàllen), 5 mm.(fig.40)–Drosophiles
ou Mouches des fruits,
Drosophila
sp.,2 mm.(fig.41,42)
Ephydridae
: Ephydra sp.,5 mm.(fig.43)8
5 -
Hémiptères
(sous-ordre des Homoptères)
Cicadidae : Cigale de l’Orne, Cicada
orni L., 37mm., avec les
ailes
(fig.44,45) – Cigale noire,
Cicadatra
atra (Ol.),33 mm - Grande
Cigale,
Lyristes
plebejus (L.), 50 mm.
V -
Considérations
entomologiques
1a -
Anatomie des
pièces
buccales
D’après
leur description par de
très nombreux auteurs
dont Calatayud & Le Ru
(2013), l’observation directe et l’examen
à fort grossissement des macro-photos numériques
ont montré dans tous les cas une absorption effective du liquide
avec les pièces
constituant des appareils buccaux.
Ces derniers,
garnis de petits organes sensoriels
(sensilles,
chimiorécepteurs)
facilitant leur action sont de types divers
: «broyeur» (Coléoptères)
utilisant en
fait non les mandibules et
les maxilles mais le labium ( lèvre
inférieure) et l’hypopharynx
(fond de la bouche) ;
«suçeur-lécheur» qu’il soit
«suçeur-labial» avec une trompe simple,
le proboscis (Diptères),
particulièrement
développée chez Platystoma
seminationis (Fig.38), ou bien
«suçeur-maxillaire» avec une trompe enroulée,
la spiritrompe (Lépidoptères) ;
«broyeur-lécheur» avec une
«langue» formée par la fusion du labium et des
maxilles (Hyménoptères).
Un autre type d’appareil buccal, dit
«piqueur-suçeur», se rencontre chez les
Hémiptères
représentés sur l’
Azérolier par des Cigales, notamment celle
de l’ Orne
(Cicada orni),
visible aussi
bien adulte (Fig.45) que sous la forme, au
bas du tronc et les branches, de la dernière
dépouille corporelle ou exuvie
abandonnée par la
larve au terme de sa
longue vie souterraine, lors d’une mue ultime,
dite imaginale, la
transformant en adulte ou imago
(Fig.44).
2a -
Comportements
particuliers de
certains Insectes
Parmi les
Cétoines,
omniprésentes, Cetonia aurata,
le «Scarabée des
Roses» (Fig.6), n’est pas
réputée comme recherchant la sève des arbres.
Floricole, elle mange plutôt les étamines des fleurs
pour leur pollen ainsi
que les fleurs
entières, des
Rosacées en
particulier, et peut également consommer des
fruits mûrs (frugivore).
En revanche, les Cétoines
«cuivrée» (Fig.7), «mate» (Fig.8),
et «noire»
(Fig.9) sont effectivement
signalées, mais
jamais en foule, sur les plaies suintantes d’arbres divers, dont
le Chêne, parmi
lesquels l’ Azérolier
n’est d’ailleurs pas
cité. Il en est de même dans les cas de la Petite Biche
(fig.14),souvent
confondue avec la femelle du Lucane
cerf-volant, et du Grand
Capricorne
(Fig.11,12) connu pour s'abreuver sur les plaies
suintantes des
feuillus, généralement au crépuscule, tandis que
Cerambyx
scopolii (Fig.10)
est
plutôt un butineur diurne
d’inflorescences
en ombelles tout comme le Xylotrechus
(Fig.12,13) et autres «Clytes»
vivement colorés (mimétisme
protecteur, dit
«batésien»,
avec les Vespidae).
PLANCHE
I (© F.Marcou).

|
Fig.6
: Cetonia
aurata
s’abreuvant à une coulée spumeuse,
vue dorsale – Fig.7 : Protaecia
cuprea,
vue dorsale
- Fig.8 : Protaecia
opaca
, vue
dorsale – Fig.9 : Protaecia
morio
,
à droite
et Protaecia
oblonga,
à gauche, vues dorsales -
Fig.10 : Cerambyx
scopolii ,
couple, vue dorsale – Fig.11
: Cerambyx
cerdo, vue
dorsale – Fig.12 :
Cerambyx
cerdo, vue
partielle,
“piétinant”
un Xylotrechus
(flèche)– Fig.13 :
Xylotrechus
arvicola,
vue dorsale – Fig.14
: Dorcus
parallelipipedus,
vue dorsale – Fig.15 : Oligota sp.
vue
dorsale
– Fig.16 : Anthaxia
funerula, vue dorsale. – Fig.17
: Bombus
hortorum,
vue antéro-dorsale - Fig.18 :
Polistes
gallicus
près de
Cétoines,
vue latérale – Fig.19 :
Vespa
crabro, vue
dorsale – Fig.20 : Vespa
crabro, affrontement, vue latérale – Fig.21 : Vespa
velutina,
vue
dorsale – Fig.22 : Vespa
velutina s’abreuvant, autre
vue dorsale – Fig.
23 : Plagiolepis
pygmaea,
en vues latérale et dorsale
(préparée, après
capture) -
Fig.24 : Cataglyphis cursor,
vue dorsale, sur une
coulée
spumeuse – Fig.25 : Camponotus
vagus,
vue dorsale
|
PLANCHE
II (© F.Marcou).
|
Fig26. : Charaxes
jasius, verso (vue latérale) et Cétoine
- Fig. 27 : Charaxes
jasius , à gauche, et Brintesia
circe, à droite,
versos – Fig.28 : Vanessa
atalanta, verso, sur une coulée spumeuse, et Cétoine
– Fig.29 : la
même
en vue
antéro-dorsale, recto – Fig.30
: Pararge
aegeria, recto – Fig.31
: Brintesia
circe, recto (vue dorsale) – Fig.32
: Brintesia circe, deux
individus
rapprochés, versos - Fig.33
: Amphipyra
pyramidea, recto – Fig.34 : Fernandinea
cuprea , vue dorsale – Fig.35:
Calliphora
vomitoria,
groupement,
vues dorsales - Fig. 36 :
Lucilia
caesar et Vespa
crabro, vues
dorsales – Fig.37 : autre
individu, près d’une Calliphore et
d’un Bourdon,
sur
écoulement spumeux - Fig.38 : Platystoma
seminationis, vue
latérale
gauche avec son proboscis – Fig.39 :
Platystoma
seminationis , la
même,
vue dorsale – Fig.40
: Phortica
variegata, vue latérale
gauche - Fig. 41
: Drosophila
sp.(flèches), groupement sur sève spumeuse - Fig. 42 : Drosophila
sp.(flèches), autre groupement et Cétoine
– Fig.43 : Ephydridae,
groupe – Fig.44 :
Cicada
orni émergeant de son
enveloppe larvaire
près de deux autres
exuvies – Fig.45
: Cicada
orni adulte (imago),vue
latérale.
|
A noter que les larves de toutes
ces
espèces, lorsqu’elles
sont xylophages 5 (Coléoptères)
n’ont pas
encore été signalées dans l’aubier 4
de l’
Azérolier qui ne
participe donc pas à leur cycle vital.
En ce qui concerne les Lépidoptères,
aucun d’eux ne pond
sur l’ Azérolier
et leurs chenilles ne
peuvent donc s’en
nourrir, notamment celle du Jason,
le plus beau Papillon diurne
de
France (Fig.26,27,46) qui est
inféodé
à l’
Arbousier
(Arbutus
unedo,
Ericacées).

|
Fig.46
- Charaxes
jasius,
recto (©A.Lopez).
|
Le
Frelon européen (Vespa
crabro)(Fig.19,20 )7 est connu depuis
longtemps comme recherchant la sève
qui s’écoule des
arbres, notamment de leurs blessures, les ouvrières pouvant
même créer ces lésions ou les entretenir en
attaquant un tronc ou des branches fragilisées avec l’aide de
leurs puissantes mandibules.
Les observations précédentes
montrent qu’il en est de même pour le Frelon asiatique (Vespa
velutina) (Fig.21,22)7 que ses besoins
énergétiques
élevés poussent à dérober des proteines
carnées dans les assiettes et sur les étals, et des
glucides soit en butinant
diverses fleurs (Lierre,
Séséli, Ciste cotonneux, Caroubier : obsv.pers.),soit
en
aspirant la sève
d’arbre comme le Frelon
européen devenu
ici son commensal !
Présence surprenante d’un
Apidé, le Bourdon des jardins
(fig.17,37) n’est connu que butinant des fleurs à corolle
profonde où il introduit sa langue
très longue qui, sous
réserve, pourrait faciliter ici l’absorption des trainées
de sève.
Divers imagos
observés
sont habituellement attirés
par les sources de nourriture
glucidique concentrée, notamment
les fruits blets c’est à dire trop mûrs, ramollis par un
commencement de décomposition, les préférant
même
au nectar des fleurs dans le cas des deux Papillons Nymphalidae
(Vulcain,
Jason)(Fig.26 à
29, 45) qui raffolent de leur jus très
sucré.
Il en est de même pour la Mouche
bleue (Calliphora
vomitoria)(Fig.35) et les Drosophiles
(Fig.41,42) qui se
pressent
volontiers en foule sur les fruits décomposés.
La minuscule Fourmi Plagiolepis
(fig.23)est réputée pour
monter sur les arbres afin d’ y lécher le miellat des Pucerons, l’écoulement
de sève
remplaçant ici cet
excrétat, dans son cas et peut être aussi ceux des
autres Formicidae.
En
dehors de
l’intérêt
trophique (nutritionnel) que
présente pour elle la sève
anormale du Crataegus,
la
mouche Syrphide Ferdinandea
cuprea
(Fig.34) constitue ici est un
très bel exemple d’inféodation à
l’écoulement par son cycle vital. Cet élégant
Diptère recherche
la sève non seulement
pour s’y abreuver
mais aussi pour y pondre comme cela a été constaté
dans les cas de Chênes
et de Frênes
blessés , leurs
larves pouvant survivre dans ce film liquide grâce à des
tubes respiratoires où
elles récoltent Bactéries
et Levures à
l’aide de soies des pièces buccales !
L’abondance des Drosophiles
s’expliquerait par
l’exploitation de composants de la sève
analogues à ceux
de fruits en surmaturation ou décomposition pour se nourrir,
s’accoupler et pondre leurs œufs. Il est possible que les larves issues
de ces derniers s’y développent, tout comme celles,
également saprophages
9 de Platystoma
(Fig.38,39) dont le
proboscis, outre la succion de
sève, jouerait un
rôle dans
un comportement de cour très élaboré.
Une mention particulière
pour
l’ espèce Phortica
variegata (Drosophilidae,
Steganinae) observée
sur l’
Azerolier
aspirant de la sève
avec sa trompe (Fig.40). Elle se singularise
par une biologie insolite, quoiqu’ici hors sujet : insecte dit «
lacrymophage », elle rechercherait aussi les larmes de
Mammifères,
Homme compris, pouvant leur occasionner des lésions
oculaires
(thélaziose) dues à un ver Nématode, Thelazia
callipaeda
dont elle est l’hôte
intermédiaire. Quant aux Ephydridae 8,
leur comportement et leur écologie parfois incroyable sont si
disparates
que mis à part la recherche d’un film liquidien sur le cambium 4
(Fig.43)
et (ou) un caractère saprophage 9. leur
présence ne
peut
être expliquée.
Reste le cas particulier des
Cigales,
notamment celle de l’Orne
(Fig.44,45), fréquentant l’Azérolier comme les
autres arbres du jardin concerné, Frênes en
particulier. Le rostre de l’appareil
«piqueur-suçeur» ne leur permet pas de se
joindre
aux divers «convives» pour récolter du suintement.
Comme
chez les Pucerons,
autres Homoptères,
mais avec une variante, il
doit percer les tissus de
l’ arbre jusqu’aux vaisseaux
du
phloème 4 afin d’y aspirer
directement la sève
élaborée sans qu’elle ne s’écoule à
l’extérieur, jaillissant dans le canal
alimentaire des stylets par
différence
de pression entre les tubes
criblés phloèmiens 4 et
l’atmosphère.
VI –
Commentaires
A
notre connaissance aucun
écoulement de sève attirant
les Insectes vers l’ Azérolier n’avait jamais été
évoqué jusqu’ici, y compris sur "Internet".
1 -
Données
comparatives
Le
phénomène est
décrit par Reber &
al.(2015) sur un plan général (résineux et
feuillus),
comme «coulées de sève active en période de
végétation»: écoulement mousseux, souvent
jaunâtre,
ne collant pas ou très peu, même sur les résineux,
laissant des traces noirâtres en hiver, pouvant dégager
une
odeur (de goudron chez le Sapin
blanc), atteignant ou dépassant
30cm de long, de constitution plus ou moins lente, bref (coulées
de sève
printanière) ou de longue durée, ce qui
est
le cas ici et serait alors pathologique. Reber rappelle qu’ «il
ne
doit pas être confondu avec les coulées de résine
chez
les Conifères et les coulées de gomme du merisier».
Les espèces «associées» sont des
Bactéries,des
Champignons (Levures) et des Insectes. Ces derniers sont
énumérés
par le même auteur en une liste plus succincte que la notre :
«Coléoptères
(Cétoines, Staphylinidae,
Nitidulidae),
Diptères
(Syrphidae,
Drosophilidae),
Hyménoptères
(Fourmis, Frelons),
Lépidoptères».
Les écoulements de sève
évoqués ailleurs
(Internet) comme attractifs d’Insectes
concernent essentiellement un
Chêne (Quercus
sp.)
visité dans une localité
française
par des Cétoines,
la Petite biche -comme
sur l'Azérolier : Fig.14 - et «de grosses
guêpes……attirées par une zone noirâtre d'où
sort une substance blanche…"
Les Papillons sont attirés
également par cette blessure
ou maladie». Par ailleurs il est signalé qu’ au Japon,
toujours sur un Quercus sp.,
«on a recensé plus de cent
espèces ainsi attirées, avec en tête des Drosophiles (les
«mouches des fruits») et des Fourmis mais
aussi des Coléoptères saproxyliques 5
adultes comme des
Lucanes, des Capricornes ou des Frelons et des Guêpes». De
leur côté, les ouvrages classiques d’ Entomologie
insistent sur la fréquence des Longicornes du genre Cerambyx.
Enfin, mais cette fois sur la sève
d’
«écorchures» des Saules, Kan & Kan (2010) ont
signalé des Frelons,
des Cétoines et
le Silène
(Brintesia
circe), mais aussi
d’autres Lépidoptères
Nymphalidae absents
jusqu'ici
à Cébazan (Nymphalis antiopa,
Polygonia
C-album, Apatura ilia).
2 -
Données
écologiques
L’Azérolier
présenté ici peut, sur le plan
écologique et comme d’ autres essences, être
considéré comme un «arbre habitat»,
développant des microstructures
lui permettant d’attirer et abriter des espèces
végétales (épiphytes
: lierre, lianes) et,
même temporairement, surtout animales, liées à la
multitude de perturbations rencontrées durant sa vie,
phénomènes abiotiques ou biotiques,
parfois générés par l'Homme.
Ces microhabitats sont des fissures,
cavités, portions sans
écorce ou même pourries (Kraus
et Krumm,2013). Ils
créent
de petites niches écologiques nommées
«microhabitats
d’arbre» ou «dendro-microhabitats»,
essentiels au
développement des Insectes
saproxyliques
(espèces
dépendant du bois malade ou mort à un certain moment de
leur vie) 5, figurées par Emberger & al. (2013),
classées ensuite par Larrieu et
al. (2014,2018) et par Bardet (2018).
Ces auteurs proposent une liste
de 47 «dendro-microhabitats
» dont font précisément partie les coulées
de sève active
illustrées par Bardet,2018,
p.32,
«sap run») et qui pourraient être, dans le cas
présent, qualifiées de « temporaires », voire
même saisonnières.
Mais il existe aussi toute une faune très
spécialisée
dans l’exploitation de ces suintements dont des Syrphes
(Diptères)
comme Ferdinandea
cuprea
(fig.34) déjà
présentée
dans cette note et des Coléoptères
de la famille
des
Nosodendridés
(«tree-wound beetles» = «
scarabées
des blessures d’arbres») ("Internet") non observés
à
Cébazan.
3 - Nature
présumée
de
l’ attraction
L’attraction
des Insectes par la
sève même d’
Azérolier est
indiscutablement le fait de substances
sémiochimiques (du grec σημεῖον, sêmeion = «
signe,
signal), messagers volatils diffusés dans l'atmosphère
à dose infime et que l’on peut qualifier d'externes,
contrairement aux hormones
11, messagers
internes. Il s’agit
ici d’ allélochimiques
ou ectomones 11,
impliqués dans la
communication interspécifique c’est à dire intervenant
entre individus
d'espèces différentes, en l’occurrence un
végétal
et des Invertébrés
Arthropodes (Metcalf &
Kogan,1987)
. Ils ne peuvent être considérés comme des
allomones 11
ni comme des synomones 11, mais au
contraire, plutôt
comme des kairomones 11 (du gr. Καιρός,
kairos =
«opportuniste» et suff. –one) dont ne
bénéficient que les seuls Insectes, taxons
récepteurs. Qui plus est, Azarolus
doit plutôt pâtir
de l’afflux des visiteurs dont le pompage par les pièces
buccales (Diptères),
l’émission de salive
et le
cisaillement des mandibules,
en particulier celles des
Coléoptères,
gros Capricornes surtout,
et des
Frelons peuvent
entretenir l’ «hémorragie» de
sève. Comme pour toutes
les autres odeurs (fleurs, fruits,
nourriture carnée) les Insectes
détectent ces
allélochimiques
11 grâce à leurs antennes 1
dont les récepteurs
ultra-sensibles
sont susceptibles de les déceler à grande distance,
plusieurs
kilomètres parfois, ce qui pourrait être le cas ici.
L’odeur
est transportée dans le vent et dispersée essentiellement
par des mécanismes de diffusion turbulente, beaucoup plus
importants
que la diffusion moléculaire, l’Insecte éloigné
percevant
à distance une série de «bouffées»
d’odeurs
intermittentes. Un message
chimique peut être porté
par une seule molécule, beaucoup plus souvent, et c’est
probablement
le cas ici, par tout un ensemble que l’on désigne alors sous le
nom de «bouquet» («blend» en anglais).
D’après les rares travaux
phytochimiques qui lui ont
été consacrés, notamment ceux de Boudjada (2018),
Crataegus
azarolus est
caractérisé par sa richesse (3-6%)
en acides caféique,
maléique, tartrique, citrique,
chlorogénique qui
permettent de stabiliser les substances
évoquées ci-dessous au cours du stockage. En outre,
divers produits volatils isolés par chromatographie et
techniques d’analyses spectroscopiques sont essentiellement des
polyphénols,
à savoir trois flavonoïdes
glycosylés
et deux flavonoides glycosides
acétylés
considérés comme des anti-oxydants 3
ainsi que des esters
de méthyle. Ils sont présents dans
toutes les parties de la plante dont les parenchymes des tiges et
racines,
impliqués dans la photosensibilisation, le transfert
d’énergie,
et le développement des plantes, en interagissant avec les
diverses
hormones 11
et régulateurs de
croissance. Les
composés
isolés les plus remarquables sont, entre autres
métabolites
secondaires, l’acide chlorogenique,
l’hyperoside, la quercetine, la
rutine,
le spiraeoside et l’ épicatechine. Le salicylate de
méthyle 2
exhalé par les fleurs
d’ Azérolier
et
présent
dans le cambium 4
d’autres arbres, dont certains
Bouleaux, est un
candidat
potentiel mais malheureusement la sève n’y sent guère
pour
pouvoir l’évoquer de façon formelle.
On concoit sans peine que faute
de
possibilités d’analyse
réalisables in situ, nous serons donc réduits dans ce
domaine phytochimique à de simples conjectures sur le ou
les responsables volatils de
l’attirance.
Il est
toutefois un deuxième
processus attractif qui peut
expliquer avec certitude le groupement en foule d’une espèce
donnée, et la fréquence des accouplements observés
: l’émission de phéromones d’agrégation et (ou)
sexuelles11 par des individus arrivés
déjà sur
place pour s’alimenter.
Dans le cas des Scolytes 6,
Coléoptères
ravageurs du bois,
non impliqués semble-t-il chez l’ Azerolier, il est
démontré
que les composés volatils des arbres et les phéromones11
de ces Insectes ont
un effet synergique sur leur attraction.
Chez les Cerambycidae, il est
prouvé que les mâles peuvent
produire une phéromone
d’agrégation, comme le monochamol
dans le genre Monochamus,
proche de Cerambyx,
et
pourrait expliquer la
pullulation de ce dernier, une fois même un véritable
« grouillement » (jusqu’à 17 individus réunis
: F.M.obsv.). Peut être en est-il de même chez les
Cétoniinae à
odeur musquée.
Dans le cas des Diptères,les
Calliphora
vomitoria
(fig.35)
volent en groupe afin de détecter les aliments avec plus d’
efficacité. Si l'une d'entre elles décèle de la
nourriture, par exemple des fruits
blets, et, dans le cas
présent, la sève
d’Azérolier, elle
disperse une
phéromone
d’agrégation11 qui alerte
ses
conspécifiques10 vers la nourriture.
L’abondance des Drosophiles
(Fig.41,42) pourrait avoir une double
explication : l’exploitation de composants de la sève analogues
à ceux de fruits en
surmaturation ou décomposition pour
se nourrir, s’accoupler et pondre leurs oeufs mais aussi
l’émission in situ de phéromones11,
dont les
hydrocarbures cuticulaires (HCs)
et le
cis-vaccényl-acétate
(cVA), propre au mâle,
impliquées dans l’attraction sociale en foule et la reproduction.
VII –
Conclusion
L’Azerolier
solitaire
planté
dans un jardin de Cébazan
présente à la belle saison un écoulement de
sève, manifestement
pathologique par l’écorce
desquamée dont il suinte, son caractère diffus et les
émissions de gaz responsables des zones spumeuses, ces
dernières traduisant un processus
de fermentation dont l’origine
bactérienne ou fungique, peut être virale, nous
échappe. L’attraction que l’écoulement exerce sur les
Insectes ne peut qu’être le fait de sémiochimiques qu’ils
perçoivent à une distance plus ou moins grande avec leurs
récepteurs
nerveux antennaires. La nature de ces substances volatiles, en principe
des flavonoïdes qui, notamment la quercétine,
auraient,
soit-dit
en passant, un potentiel anti-SARS-CoV-2, comme inhibiteurs d’enzymes
virales,
est également impossible à élucider, faute
d’étude
chimique appropriée in situ ou après transport de
matériel
en laboratoire.
Il est probable que la
consommation
sur place par ingestion avec un
appareil buccal approprié
est axée sur les glucides,
beaucoup des Insectes concernés étant connus par
ailleurs comme friands des sucres de fruits murs, voire blets, et y
attirant leurs conspécifiques10 en
émettant des
phéromones
d’agrégation11.
Enfin, sur le plan pratique de
l’Entomologie de terrain, la convergence
en une zone restreinte des Insectes les plus divers, dont le
répertoire n’est pas encore exhaustif, est un moyen original de
participation statique à la connaissance de la
biodiversité locale rappelant quelque peu les inventaires de la
faune des Panicauts, cette fois plantes herbacées
Ombellifères (Lopez,2015).
A noter pour le futur, que le
phénomène
attractif d'écoulement de sève "entomotrope" semble
devoir se pérenniser car
il s’est poursuivi en 2021 (F.M. : dès Avril
) avec la visite de ses premiers
utilisateurs
(Coléoptères Cryptophagidae-nouveaux
venus-, Fourmis,
Mouches), s'est continué en 2022,
également en Avril puis Mai (F.M.) avec certains
Papillons (fig.46
à 48) et Diptères (fig.49 à 52) mais s'est interrompu en 2023 avec la
canicule croissante, cause indéniable, et la
disparition de l'épanchement de sève qui s'en est suivi.

|

|

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Fig.
47 - Grande Tortue, Nymphalis polychloros. Recto.
Mai
2022
|
Fig.48-
Grande Tortue, Nymphalis polychloros. Verso.
Mai
2022
|
Fig.49
- Tircis, Pararge aegeria
. Recto |
La
numérotation de ces figures et des suivantes succède
à celles des images incluses dans le texte et constituant les
planches I et II.
|

|

|

|

|
Fig.49 -
Diptère Téphritide |
Fig.50 - Diptère Phaonia
|
Fig.51 - Diptère Calliphoride
|
Fig.52 - Diptère Drosophilide
|
L'étrange
phénomène est bien pérenne car, suite
sans nul doute à des pluies répétées, il
vient de se
manifester à nouveau cette année même,
2024, au mois d'
Avril, aussi spectaculaire et attractif pour les Insectes que
précédemment, le petit
arbre étant
alors en pleine floraison avec un aspect
d'ensemble normal,.
Les images suivantes en témoignent

|

|
Fig.
- Azérolier de
Cébazan, feuillé et
fleuri en Avril 2024
|
Ecoulements de
sève spumeuse (S). F,
frelon asiatique, C, Cétoines dorées
|
NOTES
1 –Les
antennes
d’Insectes, segmentées, montrent un flagelle ou
fouet, divisé en articles, les flagellomères,
couverts de poils et d'organes sensoriels microscopiques divers, les
sensilles,
qui perçoivent des informations de l'environnement grâce
à des récepteurs dans lesquels des cellules
chémoréceptrices détectant les stimuli
chimiques, goût et surtout odeurs. Les molécules de
ces dernières pénètrent les sensilles par des
micropores, sont captées par les cellules
chémoréceptrices et de là, soit empruntent des
microtubules, soit se mêlent à des protéines
olfactives pour gagner les neurones
du lobe antennaire cérébral qu’elles stimulent.
2 - Le salicylate
de méthyle C₆H₄COOCH₃
est un composé
organique volatil, l'ester méthylique de l'acide salicylique ;
il est synthétisé par plusieurs espèces
végétales. En raison de sa forte odeur et de son
goût prononcé, on l’utilise comme parfum et comme
arôme alimentaire sous le nom d'« essence de
gaulthérie couchée » ou « wintergreen
». Il est aussi prisé pour ses propriétés
analgésiques et antipyrétiques. Il ferait partie des
substances volatiles des feuilles impliquées dans la
défense contre des Insectes herbivores et semblerait même
attirer certaines de leurs espèces prédatrices.
3 - Les flavonoïdes
sont des métabolites secondaires des
plantes vasculaires, partageant tous une même structure de base
formée par deux cycles aromatiques que relient trois carbones :
C6-C3-C6. Ces métabolites, de type phénol comme les
tanins
et la lignine, assurent des fonctions écologiques importantes
pour
la survie de l'espèce. Ils jouent différents
rôles,
comme phéromones ou signaux chimiques, permettant à la
plante
de s'adapter à l'environnement, d’être
protégée
des radiations solaires et de se défendre contre les
pathogènes
et les herbivores. Ce sont des antioxydants,
leurs molécules
ralentissant
ou empêchant l’oxydation (« combinaison avec
l'oxygène
»), réaction en chaîne destructrice d'autres
substances
chimiques et nocive pour les cellules. Leur effet est souvent
bénéfique
dans l’alimentation et la thérapeutique humaines, peut
être
aussi chez les Insectes…
4
- Le cambium
(du latin cambiare, changer),
est une fine couche de
tissu méristématique se situant entre
l’«écorce interne» («seconde
écorce» ou liber) et le bois (aubier) dont il conditionne
la formation, modifie les pr opriétés et permet
à l'arbre de s’adapter à la plupart des contraintes
environnementales. Le phloème, dérivé du mot grec
φλοιός, phloios = «écorce », est, plus
précisément le tissu conducteur de la sève
élaborée. Siégeant dans l’«écorce
interne», il est formé, entre
autres structures par des vaisseaux, les tubes criblés,
cellules
vivantes intercommuniquantes où circule la sève
élaborée, bidirectionnelle, à ne pas confondre
avec la sève brute,
ascendante dans le bois (aubier du xylème).
5 - Un
xylophage
(du grec ancien : ξύλον ,xúlon = « bois
» et φαγεῖν, phageîn = « manger ») est un
organisme vivant dont le régime alimentaire est composé
principalement d'aubier4. Ces animaux, généralement des
Insectes à l'état larvaire ou adulte, mangent les
branches, troncs ou racines des arbres morts ou vivants. Parmi
eux, les saproxylophages ou
saproxyliques ne consomment que le bois en
décomposition.
6 - Les Scolytes
sont de petits Coléoptères de 2 à
3 mm de long qui creusent des galeries sous l’écorce ou dans le
bois pour y déposer leurs oeufs. Les larves, à leur tour,
creusent d’autres galeries où a lieu la nymphose. De
là, l’insecte adulte perce un trou pour s'échapper vers
l'extérieur. Ces insectes s’attaquent en priorité aux
arbresaffaiblis, leurs galeries empêchant une bonne
circulation de la sève,
ce qui entraine la mort des rameaux atteints et facilite la
pénétration des maladies cryptogamiques.
7 -Le Frelon
européen (Fig .19,20,36)
est grand
(4 cm) avec une tête brun roux à face jaune
arrondie, un thorax roux et marron, des pattes également
marron et
un abdomen jaune citron, orné de fines zones noires. Son nid, en
fibre de cellulose mâchée, construit à
l’obscurité (tronc d’arbre par exemple) a une large
ouverture inférieure. Le Frelon
asiatique (Fig.21),
sous-espèce noire et importée d’un taxon oriental, est
plus petit (3 cm) a une face orange plus allongée, un thorax
entièrement noir et velu - comme l’indique son nom
linnéen complet Vespa
velutina nigrithorax , des
pattes bicolores,
noires et jaune citron, et l’ abdomen cerné d'un anneau
jaune-orangé marqué d'un triangle noir. Son nid,
construit à la lumière dans les arbres, parfois en pleine
ville (P.Alazard, obsv.pers.sur Béziers), présente une
ouverture étroite, plutôt latérale. Sur
l’Azérolier, deux individus conspécifiques10 peuvent
s’affronter pour une meilleure place (fig.20) mais il n’a pas
été
vu de combat entre les deux espèces, donc susceptibles de
cohabiter
ponctuellement.
8 -
Les Ephydridae
sont une curieuse famille de
micro-diptères muscomorphes vivant en general dans des lieux
humides trés varies où se développent aussi leurs
larves : surface des eaux,
bord de mer, étangs trés salés, sources chaudes,
sulfureuses et même…mares de pétrole brut (Helaeomyia
petrolei) où ils se nourrissents de bactéries, algues,
plantes aquatiques diverses (riz compris !) et sont aussi saprophages9.
9 - Les saprophages
(détritivores, détritiphages)sont des
invertébrés lato sensu se nourrissant de débris
animaux, végétaux, fongiques (mycétophages) ou
d’excrétats et excréments, tous plus ou moins en
décomposition.
10 - La racine du mot suggère l'idée
d'espèce
(animale ou végétale). Le préfixe
«con-»
, quant à lui, signifie «identique». Le terme
conspécifique est donc utilisé pour décrire
deux
organismes vivants (végétaux ou animaux) de la même
espèce et se distingue donc de
«congénère» = du même genre.
11
– Les composés
allélochimiques ou ectomones
sont des
métabolites secondaires à diffusion externe produits par
un être vivant dit émetteur et qui interagit avec un autre
être vivant dit récepteur, d’une espèce
différente (communication interspécifique). Ils
comprennent : les allomones,
impliquées dans la défense,
la dissuasion et la reproduction, bénéfiques pour l’
émetteur, néfastes pour le récepteur ; les
synomones
bénéfiques à la fois pour
l'émetteur
et le récepteur ; enfin, et c’est le cas ici, les kairomones
bénéfiques
uniquement pour le récepteur. Les ectomones ne doivent pas
être
confondus avec les phéromones
probablement concernées
aussi
(Diptères, Coléoptères) mais
réservées
à la seule communication entre les individus d'une même
espèce,
donc intraspécifique, pour le regroupement social
(agrégation)
ou la reproduction. Tous se distinguent enfin des hormones, messagers
internes
transportant des informations d'un tissu à un autre dans un
même
organisme.
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Reber,A,
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types de microhabitats liés aux arbres et des principales
espèces qui y sont associées – DGE-Forêt
–CNPF-Dynafor, 2015, 23 pp.
,

|
Photo terminale - Afflux
d' Insectes sur l' Azérolier de Cébazan. Deux
Frelons asiatiques sont en vol (flèches), un troisième
est déjà installé parmi les Cétoines.
Figure choisie pour le Bulletin
comme ornement de fin de texte en guise de "cul-de-lampe"
|